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Les Cris, la suite

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Le blog du journal du lycée Jean Vilar VLA


FEMMES DE GUERRE : le combat du Dr Mukwege pour les femmes violées de RDC

Publié par Les Cris, la suite sur 22 Septembre 2014, 19:27pm

Catégories : #Le monde d'aujourd'hui

« Dans toutes les larmes s'attarde un espoir » écrivait Simone de Beauvoir. Mais dans les larmes des congolaises, l'espoir s'est évaporé. Ne reste que l'horreur, la peur, et la douleur, face aux abominations dont elles sont victimes : on les viole en République Démocratique du Congo (RDC). Des femmes, des fillettes, depuis peu des bébés. Des viols collectifs, perpétrés en public, suivis de sévices terribles : on tire des balles dans les vagins, on y introduit du caoutchouc brûlant, des lames de rasoir, de la soude caustique, du sel... Les différentes milices armées qui se disputent les mines de coltan (cf : Les Cris n°6) ont trouvé là une nouvelle arme. Tous les camps l'utilisent sans distinction : combattants rwandais et hutus, rebelles du M23, forces loyales congolaises... « Les viols correspondent à une stratégie visant à traumatiser les familles et détruire les communautés, provoquer l'exode des populations vers les villes et permettre à d'autres de s'approprier les ressources naturelles du pays explique le Dr Mukwege.


Cet homme, le Dr Denis Mukwege, 58 ans, représente le seul espoir des femmes congolaises. Gynécologue de profession, il a fondé en 1999 l'hôpital de Panzi dans la région du Kivu, au nord-est du pays. Il y accueille ces femmes mutilées, et tente de les soigner tant physiquement que psychologiquement. Plus de 40 000 ont ainsi été opérées depuis la création de l’hôpital. Alors que sa vocation était de donner la vie, le Dr Mukwege a du développer des techniques pour réparer les appareils génitaux déchirés. Il forme également des équipes médicales pour le seconder mais aussi pour ouvrir des unités décentralisées afin de secourir les femmes au pus près de chez elles. Sans parler de rendre leurs fonctionnalités aux organes (bien souvent trop endommagés), il s'agit surtout de soulager la douleur insupportable, d'arrêter et d'empêcher les hémorragies. Le Dr Mukwege s'est également spécialisé dans le traitement des fistules, ces perforations dans la paroi qui sépare le vagin de l'urètre ou de l'appareil digestif et qui rendent les patientes incontinentes...

De nombreuses femmes restent stériles, un grand nombre contractent des MST, la quasi majorité ne peut plus avoir de rapport sexuel sans ressentir de douleurs intenses. Les conséquences de tels traumatismes sur des corps d'enfants, voire de bébés, sont terrifiantes. Les femmes victimes de ces sévisses sont rejetées par leur mari, par leur famille, par leur communauté toute entière. Elles sont mises au ban de la société sans pour autant être coupables de quelque chose. Elles sont alors contraintes à l'exil et le seul refuge qu'elles trouvent sur leur route est l’hôpital de Panzi. Certaines tombent enceintes à la suite du viol. Ces enfants, appelés ''enfants-serpents'' ne seront jamais acceptés par la société congolaise et sont condamnés avant même leur naissance à une existence marginale. Le viol a une terrifiante capacité à désorganiser une communauté. En humiliant et saccageant publiquement ses femmes, il réduit à néant la cohésion du groupe. Pour le Dr Mukwege, « C'est une arme de guerre. »


Le Dr Mukwege a alerté les ONG, le conseil de l'Europe, la Maison Blanche. Il a prononcé une allocution à l'ONU, a montré aux grands de ce monde des photos, des témoignages et des statistiques. On lui a alors décerné la légion d'honneur de la République française, le prix Van Goedart, le prix des droits de l'homme des Nations Unies, le prix Olof Palme…. Et puis, il est reparti en RDC avec une dotation pour son hôpital et des promesses. A l'automne 2012, il a été victime d'une tentative d'assassinat. Mais, malgré le danger encouru, il est impossible pour lui d'abandonner les femmes congolaises à leur sort. Il vit désormais à l'intérieur même de l'hôpital de Panzi où il continue de pratiquer une douzaine d'opérations journalières sur des femmes atrocement mutilées et ……. d'attendre l'aide internationale.....

Les casques bleus de l'ONU sont présents en RDC depuis plusieurs années pour tenter de stabiliser le pays. Ils font partie de la MONUSCO. Une nouvelle résolution du Conseil de sécurité de l’ONU (la résolution n° 2080) leur confère maintenant l'autorité nécessaire pour venir en aide aux civils. Dans le même temps, une nouvelle insulte est née en langue Swahili : « tu es comme la MONUSCO ! » Cela signifie : « tu es un bon à rien »... « Comment est-il possible que le monde ne réagisse pas d'avantage à ce qui représente un déni d'humanité ? » Le viol est devenu une arme de guerre. Les larmes des congolaises sont vides d'espoir. La peur, la douleur et les cicatrices indicibles ont pris toute la place. L'enfer se trouve au Kivu...


A. ROCHE (Article paru dans Les Cris n°7, avril-mai 2014)

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